Aforismi e Riflessioni sull'Europa

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      Avec Ossians, j'ai l'impression de faire un voyage en montgolfière, loin de la terre. Mon goût pour ce poète anglais provient de la singulière force communicative qu'il possède de me transporter au-dessus des vallées et des monts, dans un vertigineux voyage aérien en compagnie de héros aux noms sonores.
      «Avec lui j'oublie la terre. Par l'audace illimitée de sa pensée, Ossian, je le répète, en arrive è concevoir des combats en plein ciel.
      - Ce sont des visions de poète !
      - Evidemment, cependant les fous ne manquent pas qui proposent de tels moyens. Mais ne sait-on pas que, souvent, ceux qu'on flétrissait du nom de fous, hier, seront peut-être considérés, demain, comme ayant été les plus clairvoyants, donc les plus sages. Ainsi, quand je pensai au débarquement en Angleterre, les inventeurs se creusèrent la cervelle. L'un d'eux me suggéra un moyen fantastique.
      - Lequel?
      - Sa lettre disait à peu près ceci:
      «Je propose un moyen qui rend inutile et les flottes de nos ennemis, et les rochers et les batteries qui protègent nos côtes; moyen qui paraîtra le comble de l'audace, mais qui, dans la réalité, est le moins dangereux de tous ceux que l'on peut tenter, moyen qui termine la guerre en un jour et rend à l'Europe la liberté des mers, sans que nous ayons à pleurer la mort d'un seul homme! Moyen, enfin, qui couronne une suite de prodiges par un prodige plus grand encore...
      «J'offre de construire un «camp portatif» et une montgolfière assez vaste pour enlever et transporter au sein de l'Angleterre l'armée qui doit en faire la conquête.
      «Que la chose soit possible, c'est un point qu'aucun physicien ne pourra contester. Je m'engage à prouver qu'elle est facilement exécutable et qu'elle ne sera pas, à beaucoup près, aussi dispendieuse que l'armement maritime qu'elle remplacera.» (Napoléon, Revue de Paris, 15.7.1932, Lacour-Gayet).