Aforismi e Riflessioni sull'Europa

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Dai Colloqui tra Monge e Bonaparte, ricostruiti da Pierre Costantini, La grande pensée de Bonaparte. L'Europe Unie, Paris, 1944 (libro molto interessante, anche se fortemente apologetico, considerata l'epoca in cui è stato scritto, ossia nel 1939 e finito di stampare nel 1944).

      - Si la volonté, le cœur et le génie suffisaient ! reprit Monge. Mais il y a tant de forces occultes qui s'opposent toujours à la floraison d'une haute idée généreuse. Les plus grands esprits ont gravi le calvaire sans réussir complètement.
      Ils ont tracé la voie. Si j'échoue. Ah! si j'échoue, quel malheur sera ma chute! Je sens que nous pouvons marcher paisiblement à la régénération universelle par la fédération européenne. L'humanité ne retrouvera pas facilement un homme capable de la guider vers ce but suprême. Les conjonctures qui ont favorisé mon éclosion ne peuvent se reproduire qu'après des siècles, peut-être. Alors, la fédération européenne ne se fera qu'à travers des tempêtes. Il pourra suffire d'une étincelle pour ramener une conflagration universelle.
      «Plus tard, on s'en rendra compte, mais trop tard sans doute. Alors, de plus forts posséderont l'Europe. Ce qui n'arriverait pas sans les intrigues des Anglais et de leurs suppôts plus ou moins occultes en France et dans le monde.
      — Je veux vous confier une chose, Monge ; il viendra un temps où chacun reconnaîtra qu'il y a bien peu de différence entre un peuple et un autre. Le climat de l'Europe est partout, le même.
      «Une de mes grandes pensées est l'agglomération, la concentration des mêmes peuples géographiques qu'ont dissous, morcelés, les révolutions et la politique. Je voudrais faire ensuite de ces peuples un seul et même corps de nation pour aboutir à l'association européenne. C'est avec un tel cortège qu'il serait beau de s'avancer dans la postérité et la bénédiction des siècles.
      «De la sorte nous n'aurions réellement, en Europe, qu'une seule et même famille.
      «Alors, peut-être, à la faveur des lumières universellement répandues, il serait permis de rêver, pour la grande famille européenne, l'application du Congrès américain ou celle des amphictyonies de la Grèce antique.
      «Et quelle perspective de force et de prospérité!
      «Quoi qu'il m'arrive, cette agglomération se fera tôt ou tard par la force des choses. L'impulsion que j'aurai donnée ne pourra être arrêtée. Qu'on ne pense pas qu'il y ait en Europe d'autre équilibre possible que la confédération des grands peuples.
      «L'Europe attend et sollicite ce bienfait. Le vieux système est à bout et le nouveau ne se fera que par moi ou à la suite de longues et furieuses convulsions.
      «Mieux vaut éviter ces catastrophes par une politique avisée. Comme je l'écrivais à Talleyrand, d'Italie, du camp de Passariano où j'avais l'intuition des grandes choses que le ciel d'Orient illumine et déploie en ce moment avec une singulière clarté:
      «Si l'on prend pour base de tôutes, les opérations la vraie politique qui n'est autre que le calcul des combinaisons et des chances, nous serons pour longtemps la grande nation et l'arbitre de l'Europe. Je dis plus; nous tenons la balance de l'Europe, nous la ferons pencher comme nous voudrons et, même, si tel est l'ordre du destin, je ne doute pas que l'on ne puisse aboutir en peu d'années à de grands résultats, que l'imagination échauffée et enthousiaste entrevoit et que l'homme froid, constant dans ses desseins et raisonné, atteindra seul.